Une nouvelle voie pour sécuriser la prise en charge de la douleur par les opioïdes
Si les opioïdes sont le traitement le plus efficace dans la prise en charge de la douleur, et en particulier de la douleur chronique, leur utilisation prolongée présente de nombreux inconvénients parmi lesquels : la tolérance, qui nécessite d’augmenter les doses pour maintenir l’effet analgésique, et l’hyperalgésie, une sensibilité accrue à la douleur induite par les opioïdes. Deux phénomènes sur lesquels se sont penchés des chercheurs de l’Université de Montpellier, de l’Inserm et du CNRS en collaboration avec la société Biodol Therapeutics, pour tenter de trouver des solutions. Leur étude publiée le 7 novembre 2024 dans Nature Communications ouvre des pistes prometteuses pour supprimer la tolérance et l’hyperalgésie tout en augmentant l’effet analgésique des opioïdes.
Dans la lutte contre la douleur, notamment chronique, les meilleures armes de l’arsenal thérapeutique sont les opioïdes, qui font preuve d’une efficacité analgésique inégalée. Problème : une utilisation prolongée des opioïdes peut entraîner une tolérance obligeant le patient à augmenter la dose pour maintenir l’effet analgésique, avec de lourdes conséquences en termes d’effets secondaires et de risques d’addiction.
Par ailleurs, les opioïdes peuvent induire de façon paradoxale une sensibilité anormale à la douleur, appelée « hyperalgésie ».
Si les mécanismes à l’origine de ces phénomènes restent imparfaitement connus, on sait que ces effets contradictoires sont notamment médiés par le récepteur mu-opioïde périphérique MOR. Une voie importante mais qui n’est pas la seule impliquée. Dans cette étude, Cyril Rivat, chercheur à l’Institut des Neurosciences de Montpellier (INM), et ses collaborateurs de l’Université de Montpellier, de I’Inserm, du CNRS et de la société Biodol Therapeutics, ont mis en évidence une co-expression du récepteur MOR et du récepteur tyrosine kinase FLT3, qui participerait au développement de la tolérance et de l’hyperalgésie paradoxale liées aux opioïdes.
Restaurer l’efficacité de la morphine
Pour perturber l’effet de ce récepteur FLT3 nouvellement identifié, les chercheurs ont ici testé les effets d’une molécule particulière, un inhibiteur appelé BDT001. Administré chez le rongeur en même temps que la morphine, celui-ci a permis non seulement de prévenir l’apparition des phénomènes de tolérance et d’hyperalgésie mais aussi d’augmenter de façon importante le potentiel analgésique de la morphine sans aggraver les autres effets indésirables induits par les opioïdes.
Le traitement par l’inhibiteur BDT001 a aussi montré sa capacité à supprimer les phénomènes de tolérance et d’hyperalgésie déjà installés chez des rongeurs préalablement exposés aux opioïdes, permettant ainsi de restaurer l’efficacité de la morphine.
« Nos résultats suggèrent que l’association de la morphine et des inhibiteurs de FLT3 pourrait devenir une voie prometteuse pour la gestion de la douleur chronique afin d’exploiter en toute sécurité la puissance des opioïdes, sans risque d’augmenter les doses voire de les diminuer afin de réduire l’ensemble des effets secondaires », souligne Cyril Rivat.
Une avancée majeure alors même que ces médicaments sont au cœur d’un énorme enjeu sanitaire, notamment aux États-Unis où la « crise des opioïdes » a provoqué le décès de 800 000 personnes en 25 ans.
Référence
Jouvenel, A., Tassou, A., Thouaye, M., Ruel, J., Antri, M., Leyris, J. P. … & Rivat, C.
FLT3 signaling inhibition abrogates opioid tolerance and hyperalgesia while preserving analgesia. Nat Commun 15, 9633 (2024). https://doi-org.insb.bib.cnrs.fr/10.1038/s41467-024-54054-y
En savoir plus : https://www.umontpellier.fr/articles/a-lum-la-science-s04-ep09-securiser-le-traitement-de-la-douleur
© Cyril Rivat, Institut Neurosciences de Montpellier de Neurosciences, INSERM
2025 Angélique Arvanitaki Lecture
The first Angélique Arvanitaki Lecture will be given at NeuroFrance 2025 by Martin Giurfa on the theme “Cognitive neuroscience in miniature brains – Dissecting higher-order learning in honey bees”.
Discover the 7 other plenary lectures and the 36 selected symposia on NeuroFrance 2025 website.
Nicotine et adolescence : un déséquilibre cérébral qui prédispose à la dépendance
Les mécanismes par lesquels la consommation de nicotine à l’adolescence augmente le risque de dépendance à l’âge adulte demeurent mystérieux. Une étude récente pilotée par Lauren Reynolds et Philippe Faure, révèle que chez la souris, l’exposition à la nicotine pendant cette période critique perturbe durablement les circuits dopaminergiques en développement, favorisant ainsi un état de vulnérabilité prolongé.
Les chercheurs ont d’abord constaté que les souris adolescentes avaient une sensibilité accrue aux effets gratifiants de la nicotine, tant au niveau physiologique que comportemental. Les chercheurs ont ensuite montré que des souris exposées à la nicotine au début de leur adolescence manifestaient, une fois adultes, des comportements et des réponses physiologiques similaires à ceux observés chez les jeunes souris adolescentes.
Les chercheurs ont établi que ce phénomène était lié à une perturbation des circuits synthétisant la dopamine, en fonction de leurs projections vers le striatum ou l’amygdale. Ces résultats suggèrent que l’exposition à la nicotine pendant cette période de développement critique déséquilibre durablement les circuits dopaminergiques, maintenant ainsi les individus dans un état cérébral immature, et les rendant plus susceptibles de développer une dépendance à l’âge adulte. En rétablissant l’équilibre de cette activité neuronale dopaminergique, les chercheurs ont pu rétablir un comportement normal chez les souris adultes qui avaient été exposées à la nicotine durant leur adolescence.
Figure : Les souris adolescentes montrent une sensibilité accrue aux effets gratifiants de la nicotine, tandis que les effets émotionnels négatifs sont moins prononcés. Les neurones dopaminergiques projetant vers le noyau accumbens, une région clé dans la régulation de la récompense et de la motivation, affichent une réponse amplifiée à la nicotine chez les adolescents par rapport aux adultes. En revanche, les neurones projetant vers l’amygdale (en bleu), impliqués dans la gestion des émotions et de la peur, ne subissent pas de modification notable. L’exposition à la nicotine à l’adolescence maintient ce déséquilibre neuronal chez les adultes, prolongeant ainsi l’état de vulnérabilité à la dépendance. © Lauren Reynolds
Référence
Transient nicotine exposure in early adolescent male mice freezes their dopamine circuits in an immature state
https://doi.org/10.1038/s41467-024-53327-w
Lauren M. Reynolds, Aylin Gulmez, Sophie L. Fayad, Renan Costa Campos, Daiana Rigoni, Claire Nguyen, Tinaïg Le Borgne, Thomas Topilko, Domitille Rajot, Clara Franco, Sebastian P. Fernandez, Fabio Marti, Nicolas Heck, Alexandre Mourot, Nicolas Renier, Jacques Barik, and Philippe Faure
© Philippe Faure et Lauren Reynolds | phfaure@gmail.com | laurenreynoldsm@gmail.com | Laboratoire Plasticité du Cerveau, ESPCI – CNRS UMR 8249
New Angelique Arvanitaki Lecture
Wishing to honor women neuroscientists, the Governing Council of the French Neuroscience Society has decided to change the name of the Paul Broca Lecture to the Angelique Arvanitaki Lecture.
Angélique Arvanitaki was a neurophysiologist of Greek origin, born in Cairo in 1901 and who died in Marseille in 1983, renowned for her pioneering work in electrophysiology. She emigrated to Lyon for her studies, where she obtained her PhD in 1938 and spent most of her career in France.
Angélique Arvanitaki was a pioneer in the investigation of electrical nerve activity through her studies of neurons in terrestrial and marine molluscs such as aplysia, and notably discovered and named the principle of ephaptic coupling. She also explored the photoexcitability of certain neurons.
In 1960’s, she participated in founding the Neurophysiology and Psychophysiology Institute in Marseille, where she headed the Department of Cellular Neurophysiology.
Angélique Arvanitaki brilliantly carried the colors of French neuroscience from the 1930s to the 1960s.
The first Angelique Arvanitaki Lecture will be given at NeuroFrance 2025 in Montpellier.
2025 Alfred Fessard Lecture
At NeuroFrance 2025, the Alfred Fessard Lecture will be given by Catherine Tallon-Baudry on the theme “Greater than the sum of its parts: brain, heart and stomach”
Discover the 7 other plenary lectures & the 36 selected symposia on NeuroFrance website.
NeuroMentoring session: Reviewing tips and training to better publish your results
You need reviewing tips to improve reviewing efficacy and therefore your own publications? Don’t miss this mentoring session organised by our Young Researcher’s Office!
Wednesday 4 December, 5:00pm
Maria Cecilia Angulo (IPNP, Paris) & Erwan Bezard (IMN, Bordeaux)
On Zoom (link sent to Society members)
Appel à candidatures – Journées Thématiques 2026
La Société des Neurosciences lance un appel à candidatures pour l’organisation de ses Journées Thématiques 2026.
Ces journées ont pour objectif de permettre à des communautés d’organiser un congrès de deux jours, au mois de mai, autour d’une thématique représentative de la communauté locale, dans des villes qui ne seraient pas en capacité d’accueillir le colloque NeuroFrance.
Le choix du programme et des orateurs repose sur le comité local, avec validation du Conseil d’Administration de la Société. Le comité local devra également faire une suggestion d’une conférencière pour la Lecture Alfred Fessard, s’intégrant à la thématique choisie. Par ailleurs, la Société des Neurosciences tiendra son assemblée générale annuelle lors de ces journées.
Financement des journées
Le comité local est responsable tant sur le plan organisationnel que financier. La Société des Neurosciences apportera son aide tout au long de l’organisation, gèrera le budget, les inscriptions et résumés et communiquera sur l’événement.
Les organisateurs locaux seront chargés de trouver des financements pour l’ensemble de l’événement (à l’exception de la lecture Alfred Fessard). La Société des Neurosciences pourra appuyer les demandes de subvention et de partenariat. Des frais d’inscription peuvent être prévus pour couvrir une partie des dépenses.
Dossier de candidature
Votre candidature devra parvenir au secrétariat de la Société des Neurosciences au plus tard le 15 janvier 2025 par mail : info@societe-neurosciences.fr
Télécharger le dossier de candidature
Photo : © Arnaud Rodriguez
Ancrer les récepteurs NMDA aux synapses: comment la kétamine contrecarre l’action d’autoanticorps pathogène
La kétamine, un anesthésique quotidiennement utilisé à l’hôpital, a démontré récemment un effet antidépresseur rapide chez les patients souffrant de dépression. Cette découverte majeure a ouvert de nouvelles pistes thérapeutiques dans la prise en charge des troubles de l’humeur, notamment chez des patients résistants aux antidépresseurs. Cependant, le mode d’action moléculaire de la kétamine reste encore mal connu. Dans une nouvelle étude, pilotée par Julien Dupuis et Laurent Groc (IINS, Bordeaux) et regroupant des partenaires du CHU de Bordeaux, CHU de Lyon, et INSERM, il apparait que la kétamine, au-delà de son effet antagoniste sur le récepteur glutamatergique NMDA, favorise l’ancrage de ce récepteur aux synapses excitatrices. Cette propriété inattendue de stabilisation du récepteur NMDA permet de contrer l’action délétère d’auto-anticorps dirigés contre ce récepteur qui causent l’apparition de troubles psychiatriques et neurologiques sévères. La kétamine, contrairement à d’autres antagonistes du récepteur, est un stabilisateur synaptique puissant du récepteur NMDA. Ce travail, publié dans le journal Neuron, ouvre donc des perspectives nouvelles sur le rôle prépondérant de la stabilisation des récepteurs synaptiques dans des processus pathologiques et thérapeutiques.
Référence
Villéga F, Fernandes A, Jézéquel J, Uyttersprot F, Benac N, Zenagui S, Bastardo L, Gréa H, Bouchet D, Villetelle L, Nicole O, Rogemond V, Honnorat J, Dupuis JP, Groc L.
Ketamine alleviates NMDA receptor hypofunction through synaptic trapping.
Neuron. 2024 Jul 17:S0896-6273(24)00490-2.
doi: 10.1016/j.neuron.2024.06.028.
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En savoir plus sur https://www.insb.cnrs.fr
© Laurent Groc, Institut Interdisciplinaire de Neurosciences, IINS
Programme de NeuroFrance 2025
Le programme de NeuroFrance 2025 est en ligne !
Pour le consulter, rendez-vous sur le site internet du colloque.
Contribute to the European Partnership for BrainHealth
As a major associative player in the field of neuroscience, the French Neuroscience Society invites the neuroscience community to contribute to the Coordination & Support Action BrainHealth Strategic Research & Innovation Agenda (SRIA).
By filling out this online survey, you can contribute to the SRIA, which outlines strategic priorities of the upcoming European Partnership for BrainHealth. The survey will be open until August 14 and takes approximately 20 minutes to fill.